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Les origines :


le mot "psychologie" est créé au XVI siècle par le Réformateur allemand P. Melanchthon (1497-1560). Le concept "psychologie" est défini par C. Wolff ( 1674-1754); mais c'est au XIX siècle qu'apparaît la psychologie en tant que discours et savoir autonome sur l'homme. L'intérêt des philosophes pour les idées et les processus intellectuels remonte bien plutôt : au V et VI siècle avant J.-C,. Platon ( Phédon, théétète), Aristote ( les catégories, Premiers et Seconds Analytiques).

Néanmoins, on considère que c'est Descartes qui est à la base des courants d'où naît plus tard la psychologie moderne. Il postule un dualisme entre l'âme et le corps; la connaissance que nous avons de l'âme est directe et intime, tandis que le corps peut faire l'objet d'études empiriques. Des idées de Descartes, deux conceptions sont issues : une psychologie spiritualiste, étrangère à l'observation et à l'expérimentation, qui s'intéresse à l'activité de l'esprit et une conception empiriste. Parallèlement, le courant matérialiste des médecins français philosophes tels que J. de la Mettrie (1709-1751), le courant sensualiste de E. de Condillac (1714-1780) et le courant mécaniste de P. Cabanis (1757-1808) font pendant à l'empirisme anglais et préparent la psychologie physiologique.

Pour J. Lock (1632-1704), fondateur de l'école empiriste anglaise (Essaye on Human Understanding, 1690), toutes nos idées viennent de l'expérience, nos sens gouvernent notre connaissance. Lock distingue les idées simples et les idées complexes, et suggère que l'esprit passe des premières aux secondes par association.

D. Hume (1711-1776) développe les conceptions associationnistes, ainsi que D. Hartley (1705-1757), qui fonde la vie psychique sur l'association, dont la répétition est le principe fondamental. Le plein dévéloppement de l'empirisme associationniste anglais est atteint avec J. Mill ( 1773-1836) : le processus de l'association des idées se produit selon des lois analogues à la mécanique, par contiguïté entre les "points de conscience". Pour son fils J. S. Mill (1806-1873), les  associations obéissent à des lois de type chimique : les idées complexes n'ont pas les mêmes propriétés que les idées simples dont elles sont issues. Néanmoins, ces idées, qui préparent la psychologie moderne, rencontrent en France des oppositions avec Maine de Biran (1766-1824), qui prône l'expérience intérieure, et plus tard avec l'école éclectique (P. Royer-Collard, 1763-1845). D'un autr côté, les scientifiques, à l'instar des philosophes, sont, eux aussi, confrontés à des questions psychologiques. Par exemple, en astronomie, les erreurs systématiquement commises par les observateurs renvoient au problème de l'erreur des sens et de la stabilité individuelle.

L'évolution des sciences physiologiques a joué un rôle fondamental. Après A. von Haller(1708-1778), la physiologie devient une science expérimentale, avec J. P. Müller (1801-1858), C. Bernard (1813-1878) entre autres. Le perfectionnement des instruments de mesure et les progrès réalisés concernent la physiologie des sensations (mesure des seuils sensoriels, E. Weber [1795-1778]), la physiologie du système nerveux ( découverte des cellules dans le système nerveux, menant à une  conception des phénomènes en éléments, mise en évidence de l'action intégratrice  du système nerveux). Ces progrès, liés à la mesure de la vitesse, notamment celle du temps de réaction, conduisent aux premiers paradigmes expérimentaux psychophysiques et psychophysiologiques, qui naissent dans les laboratoires allemands de physiologie.


Les débuts de la psychologie :


En 1860, G. T. Fechner publie en Allemagne Elemente der Psychophysik, qui marque une étape importante. Fechner (1801-1887), brillant mathématicien  et physicien préoccupé de questions métaphysiques, cherche à montrer l'identité de l'esprit et de la matière. Il veut quantifier l'intensité de la sensation en rapport avec l'intensité de la stimulation. En cherchant une relation entre énergie mentale et énergie physique, Fechner quantifie les phénomènes psychiques. Ses travaux sont à l'origine de la mesure en psychologie, ainsi que de l'étude des seuils. Dans une optique différente, H. von Helmholtz (1821-1894) étudie les mécanismes de la vision des couleurs, de la perception et de la hauteur des sons. il emploie notamment la technique du temps de réaction pour mesurer la vitesse de l'influx  nerveux. Néanmoins, le véritable fondateur de la psychologie expérimentale est W. Wundt (1832-1920). physiologiste de formation, il atravaillé chez Fechner  et Weber. Il crée en 1879 à Leipzig le premier laboratoire de psychologie expérimentale. Pour lui, l'expérimentation n'a de sens que si elle est fondée  sur l'introspection.

Les débuts de la méthode expérimentale sont d'ailleurs le plus souvent caractérisés par l'utilisation de cette méthode : ses fondateurs F. Galton , en Grande -Bretagne, A. Binet, en France, l'emploient. Wundt procède à l'analyse des processus de conscience en leurs éléments et décrit comment ces éléments sont associés les uns aux autres; pour cela, il utilise de nombreux appareils, qui permettent de standardiser l'observation. Ses travaux portent sur les perceptions et les sensations; sa méthode analytique ne convient pas pour l'étude des processus supérieurs, pour lesquels il prône la méthode historique, et pour l'analyse comparative du développement de la pensée humaine : son ouvrage  Völkerpsychologie (1900-1920) sort six ans après Grundzüge der physiologischen  Psychologie (1874). L'influence de Wundt, qu fonde la revue Philosophische Studien, est considérable. De nombreux psychologues de premier plan se sont formés chez lui : Titchener, R. B. Cattell, S. Hall, Külpe.

La même année que paraît Grundzüge der physiologischen Psychologie (1874), F. Brentano publie Psychologie vom empirischen Standpunkte. Face au développement de la psychologie du contenu, le philosophe Brentano (1838-1917) représente la psychologie de l'acte. Sa pensée est à l'origine de la phénoménologie; Husserl a été son élève. L'acte se réfère à l'objet qu'il contient intentionnellement . La psychologie de l'acte de Brentano connaît des développements dans la psychologie de la forme ( gestaltthéorie); C. Stumpf (1848-1936), elève de Brentano, enseigne à son tour Gelb, Koffka, Köhler.

H. Ebbinghaus (1850-1909), scientifique indépendant, découvre l'ouvrage de Fechner Elemente der Psychophysik et a l'idée d'appliquer la même méthode aux processus supérieurs. Il travaille sur la mémoire; il invente une méthode, crée  un nouveau matériel et détermine les facteurs influant sur le taux de rétention. Ses  résultats sont publiés dans Über das Gedächtnis (1885).

Parallèlement, O. Külpe (1862-1915), ancien élève de Wundt et fondateur de l'école de Würzburg, tente d'appliquer sur la pensée ce que  Ebbinghaus fait sur la mémoire. Sa méthode est également fondée sur l'introspection.

Si c'est dans les laboratoires allemands de physiologie qu'est née la psychologie  expérimentale, l'établissement de la psychologie en France, en Grande-Bretagne , en Russie et aux Etats-Unis est marqué par la culture intellectuelle de chaque pays, et dépend de ces institutions propres. En Grande-Bretagne, l'influence de C. Darwin (1809-1882), the Origin of Species (1859), s'étend à la psychologie. Par ailleurs, il ouvre le champ d'une psychologie comparée entre l'homme et les animaux. Le fondateur de la psychologie anglaise est son cousin, sir F. Galton (1822-1911), chercheur très fécond. Créateur de la psychologie différentielle, il s'intéresse à l'héréditabilitédes capacités intellectuelles. Sa méthode consiste à mesurer un grand nombre d'individus et à situer un sujet par rapport à la population. Cette pratique de l'étalonnage, appliquée par Galton à la recherche de la définition du "génie", conduit à l'étude statistique des différences individuelles. L'étude des statistiques et de leur application à la psychologie se poursuit après lui  en Grande-Bretagne avec K. Pearson, R. Fischer, A. Bravais.

En France, la psychologie est née de la psychopathologie. T. Ribot (1839-1916) est le fondateur de la psychologie comme science autonome. Il conteste la philosophie  éclectique et introduit la psychologie d'outre-Manche grâce à son livre la Psychologie anglaise contemporaine (1870). Il est chargé d'un cours de psychologie expérimentale à la Sorbonne (1885) jusqu'à ce qu'une chaire de psychologie soit créée pour lui au collège de France (1888). Selon lui, la maladie mentale, en dissolvant les fonctions normales, fait apparaître les fonctions sous-jacentes. Ribot qui est plus un théoricien qu'un praticien, pousse ses meilleurs élèves agrégés de philosophie (G. Dumas, P. Janet) à étudier la médecine. Il fait créer un laboratoire de psychologie physiologique dont il confie la direction au physiologiste H. beaunis (1830-1921). C'est à A. Binet (1857-1911), successeur de Beaunis, que revient la création de la psychologie expérimentale en France. Binet s'intéresse à la psychologie de l'enfant. Travaillant sur les différences individuelles, il emploie le matériel de Wundt, mais il estime que les processus supérieurs, en particulier la pensée et l'intelligence, doivent être mesurés par des tâches plus complexes et plus proche de la vie quotidienne. L'échelle de mesure de l'intelligence qu'il crée en 1905 est le véritable premier test mental. Ce terme a été introduit par l'Américain Cattell, mais celui-ci échoue en utilisant le matériel de laboratoire de Wundt, tandis que le travail de Binet est une véritable réussite, surtout reconnue à l'étranger. En France, l'université reste longtemps réservée vis-à vis de la psychologie expérimentale. Ce n'est qu' en 1948 qu'est créée la licence en psychologie.

H. Piéron (1881-1964) domine la psychologie expérimentale de 1910 à 1950. Il donne à la psychologie, jusque là clinique et psychiatrique, une orientation plus physiologique. dans la leçon inaugurale à l'Ecole pratique des hautes études en 1907, il annonce, six ans avant Watson, sa volonté d'éliminer les données de l'introspection, en assignant à la psychologie l'étude des comportements, humains ou animaux.

En Russie, le développement de la psychologie est lié à la physiologie. I. P. Pavlov (1849-1936), physiologiste, découvre les réflexes conditionnés : les sécrétions digestives peuvent être provoquées par un signal, par exemple un son de cloche, qui précède la nourriture. La découverte du conditionnement ouvre la voie au béhaviorisme. V. M. Bechterev (1857-1936), psychiatre, utilise la méthode des réflexes conditionnés. L. S. Vygotski (1857-1934) rompt avec les traditions mécanistes, s'intéresse au développement mental de l'enfant et à l'éducation. Son apport majeur réside dans la conception qu'il assigne au langage, en particulier le langage égocentrique, dans le développement mental.

Aux Etats-Unis, l'initiateur de la psychologie a été W. James (1842-1910). Il oriente la psychologie vers le fonctionnalisme, dont J. Dewxey (1859-1952), son élève, est le théoricien et le promoteur. Il s'oppose à la psychologie des éléments mentaux, et l'oriente vers les opérations mentales. L'esprit est principalement engagé dans la médiation entre environnement et besoin de l'organisme. Le fondateur de la psychologie américaine est S. Hall (1844-1924). Après avoir fait son doctorat avec  James, il part travailler chez Wundt en Allemagne. De retour, il fonde en 1885 un laboratoire de psychologie à l'université John Hopkins, à Baltimore (Maryland, Etats-Unis).

J. McK. Cattell (1860-1944) a également été formé chez Wundt, puis il a travaillé chez Galton, en Grande-Bretagne. Nommé en 1888, il est le premier à porter le titre de professeur de psychologie aux Etat-Unis. Il poursuit ses recherches sur les tests  et les méthodes statistiques, en les orientant vers leur application pratique.



 

Références :

 

Grand dictionnaire de la psychologie